Après d’âpres négociations, le couple franco-allemand semble avoir redonné un peu de couleur à l’esprit européen. Les positions allemandes n’ étaient en aucun cas de mutualiser la dette consécutive à la crise liée aux coronavirus. Ni même d’apporter le moindre soutien à l’économie des pays les plus touchés par la crise née de la pandémie. L’orthodoxie financière allemande a, malgré tout, ses limites. Que vaut en effet une capacité industrielle puissante et prospère, si elle ne trouve pas de débouchés à sa production à la suite de l’écroulement économique de ses partenaires européens.
Présenté lors d’une visio-conférence, le plan de relance de 500 milliards d’euros a finalement été présenté avec cet axe: « À cette fin, nous devons plus que jamais mettre à profit la puissance que nous tirons de notre action conjointe en tant qu’Européens, et unir nos forces de façon inédite. Nous devrons aussi mener une réflexion approfondie sur les leçons à tirer de cette crise. La Conférence sur l’avenir de l’Europe sera l’occasion d’ouvrir un vaste débat démocratique sur le projet européen, ses réformes et ses priorités. »
Il s’agit d’un premier pas, puisque ce plan doit aussi être avalisé par les 27 pays membre de l’Union Européenne , dont au premier chef les Pays-Bas et les pays Scandinaves qui sont opposés à une politique d’endettement excessif.
Mais il ressort à la lecture du plan, dont le montant de 500 milliards s’additionne aux 1 000 milliards déjà prévus, une volonté d’aborder les sujets de souveraineté nationale et européenne. Et face à des investissements réalisés par des acteurs non-européens, est enfin évoquée la nécessité de prévoir un objectif de contrôle des investissements dans les secteurs stratégiques, comme la santé, l’énergie ou la défense. La nécessité de garder la compétence, les savoir-faire, et la production en Europe commencent à s’imposer enfin.
La volonté politique s’appuiera sur des mesures destinées à harmoniser les méthodes de comptabilisation des décès liés au Covid-19, à pouvoir créer des stocks communs de médicaments, masques et autres équipements médicaux, et à empêcher que les entreprises européennes ne soient pas amenées, pour des objectifs à court terme, à accorder à des pays tiers les résultats de leurs recherches sur les vaccins.
Bien évidemment si ces objectifs sont établis, de nombreux points restent à définir. Berlin n’envisage pas que les pays bénéficiaires de ces aides ne puissent pas être amenés à en éviter le remboursement. Ils devront donc rembourser, mais ce qui est important c’est la méthode qui change, car l’emprunt sera souscrit au niveau européen.
Jean Cousin