D’aucuns ont vu un accueil un peu trop positif de la presse à la nomination de Gabriel Attal. Mais en tant que porte-parole du gouvernement de Jean Castex de 2020 à 2022, pendant presque deux ans, avec un instinct politique certain, il sut, lors du point-presse à l’issue des conseils des ministres du mardi, présenter une situation politique conforme aux décisions et orientations choisies. Et, en accordant systématiquement une dizaine de minutes de off, à l’issue de ces points-presse, il sut se démarquer habilement.
La grande force de Gabriel Attal est sa rapidité d’esprit. À l’extérieur, rue de l’Elysée, il savait partager les interrogations légitimes des journalistes réunis autour de lui sur la cohérence réelle des décisions du gouvernement, et la situation politique. Habile, il apportait une clarification des éléments de langage gouvernementaux, tout en faisant preuve du nécessaire recul face à certaines décisions gouvernementales fragiles dans les faits et leur logique. Ces quelques minutes donnaient le sentiment de percevoir l’intelligence du pouvoir.
Aujourd’hui, Gabriel Attal est passé de porte-parole du gouvernement qu’il fut, à ministre de l’Éducation nationale et à Premier Ministre du gouvernement, poursuivant en cette seizième législature une carrière politique pourtant déjà longue. Son parcours l’a confronté à de nombreux niveaux de responsabilité, qu’il fut militant, membre de cabinet, conseiller municipal, député, membre de commission, voire rapporteur, secrétaire d’État ou ministre délégué. Les qualités humaines, la clarté, la rapidité, la pertinence du porte-parole seront elles aussi celles du Premier Ministre? Telle est l’inconnue.
En le choisissant, politiquement, Emmanuel Macron bouscule le jeu des ambitions présidentielles. Depuis des décennies, le choix du Premier Ministre, oriente et tisse un lien direct avec la pays. La fonction de Premier Ministre a permis à nombreux occupants du poste de se positionner comme candidat. Des candidats aux présidentielles comme Raymond Barre, François Fillon, ou in fine des élus à l’instar de Georges Pompidou ou Jacques Chirac. De fait, la fonction de chef de gouvernement devient un indéniable tremplin pour obtenir les moyens financiers et l’éclairage médiatique nécessaire dans l’organisation et l’appui d’une campagne présidentielle.
Jean Cousin
