En confirmant dès l’introduction de la conférence de presse sa présence dans la rue les 22 et 26 mai, Génération-s se place à contre-pied de ce que les porte-parole, Aurore Lalucq et Abel Abehdu, mouvement appellent la » techno-crature ».
Depuis sa création par Benoît Hamon en 2017, l’action développée par Génération-s offre l’opportunité d’assister in vivo à une démarche politique qui relève les défis auxquels sont confrontées les démocraties européennes, prises en étau entre néo-libéralisme et extrémisme identitaire. Et cette conception nouvelle du fonctionnement d’un mouvement appelle de nombreuses questions auxquelles cette conférence a apporté quelques réponses.
La première caractéristique du fonctionnement de Génération-s se situe dans son fonctionnement « horizontal », un process qui s’ appuie sur l’un des postulats du candidat Benoît Hamon qui, le soir _de son élection lors des primaires, rappela sa foi en » l’intelligence des peuples ». Le mouvement s’inscrit donc dans un principe d’horizontalité. Chaque proposition est mise au vote, et chaque proposition est soumise à l’analyse de chacun. Le mouvement est structuré autour d’un conseil constitué des membres issus de la société civile. Ce conseil produit des statuts qui sont mis au vote parmi tous les membres.
Depuis septembre 2017 le mouvement s »attache à intégrer un mode de fonctionnement plus démocratique. Le 2 décembre une charte des principes a été adoptée. Aujourd’hui Génération-s, c’ est 850 comités locaux et la perspective d’atteindre les 60000 adhérents pour Grenoble le 30 juin, avec la présence de 1000 congressistes issus des comités locaux. Génération-s appelle à voter et décider sur tout: la charte, le fonctionnement dans chaque comité, la co-construction, l’organisation, les idées. De ces aller-et retour découle l’orientation du mouvement, et c’est la convention de Grenoble prévue le 30 juin 2017 qui confirmera sa véritable orientation.
C’est donc un fonctionnement qui se différencie de celui des mouvements verticaux dans lesquels une tête dotée de pensée et de savoir impose à des strates inférieures les projets qu’il faudra mettre en oeuvre. L’ important étant de ne pas y simuler l’horizontalité, ni de noyer les militants de principes abstraits. Toujours selon ces principes, il n’existe pas de vote préférentiel. Jusqu’à présent, selon les critères d’adhésion, la double appartenance a toujours été possible, les membres sont toutefois appelés à trancher en ce moment sur ce point. Et, au 1er juillet, c’est sur la décision des 60000 membres que sera décidée leur adhésion définitive , une adhésion qui, aujourd’hui, se fait par internet, via le site.
Comme les porte-parole le soulignent, l’organisation diffère totalement de celle du LREM , l’autre parti qui procède aux adhésions par le net. Si même au LREM le credo est celui d’une prise en compte des avis des adhérents, il semble bien pourtant que les décisions sont prises à l’Elysée, au mieux dans des comités locaux. A Génération-s, au contraire ce sont les comités locaux qui détiennent les vraies prérogatives, et chaque comité local est indépendant. L’ ensemble de l’organisation est donc décidée par tous, et non par un seul. Et, comme le souligna la porte-parole Aurore Lalucq, » Il s’agit de ne pas improviser, la démocratie prend du temps ».
Depuis septembre le mouvement poursuit un but: l’unité. Et grand mouvement prévu pour le 26 mai devrait être celui des convergences face à des mesures de régression. En pratiquant une politique d’ouverture, – tout parti et mouvement de gauche est aussi invité au congrès du 30 juin-, Génération-s nourrit l’ambition de restaurer une unité de la Gauche, un impératif pour lutter contre le morcellement, une priorité pour préparer les élections européennes avec le mode de scrutin proportionnel. Mouvement lui-même écologique, Génération-s a des bases proches de celles de EELV. L’ unité de la gauche est ainsi appelée par les militants eux-mêmes, elle ne se limite pas aux seuls EELV, mais s’inscrit dans une perspective fédératrice au niveau national et européen. En somme » un projet commun de la Suède à la Grèce, transnational, dès lors que le strictement national n’a pas de sens au niveau européen » , qui figurait dans l’Appel de Naples du 10 mars 2018.
C’est cette dimension progressiste européenne qui constitue le point de divergence entre Génération-s et La France Insoumise. Alors que ces deux mouvements convergent dans leur analyse sur l’échec de la politique libérale, ils s’opposent frontalement par leur position européenne. Alors que La France Insoumise envisage une sortie de l’Europe, Génération-s ne « croit pas qu’ils peuvent mobiliser derrière une sortie de l’Europe, ni ne pose la condition d’un changement des traités » martèlent Aurore Lalucq et Ali Abeh .
Et alors que, pendant cette conférence, Benoît Hamon, en retrait, avait laissé s’exprimer les deux porte-parole du mouvement, Aurore Lalucq et Ali Abeh , ne corrigeant avec humour qu’ un lapsus géographique, il conclut par ces mots: « Nous ne pouvons pas valider une sortie ( de l’Europe) qui est l’un des mots d’ordre de l’Extrême Droite. »
Dominique Grimardia
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