10 ans après l’initiative lancée le 3 août 2010 par Roselyne Bachelot- Narquin, alors ministre de la Santé, et dans le prolongement des préconisations apportées en 2011, année qui fut déclarée en France « année des patients et de leurs droits », une enquête d’Harrts Interactive dresse en quelque sorte un état des lieux de la place prise par internet dans les rapports du patient et des professionnels de santé.
Bien éloignées des « millions de Français qui – selon Madame la Ministre- échangeaient alors chaque jour des informations de santé sur Internet », les analyses d’ Harris Interactive s’appuient sur 2148 répondants nationaux représentatifs, auxquels furent soumises 50 questions. 55% des personnes questionnées étaient sujettes à des maladies bénignes ponctuelles, 45 % atteintes de maladie chronique enregistrée comme affection de longue durée (ALD).
L’un des premiers points révélés par cette étude réside dans la moyenne d’âge sensiblement égale pour ces deux catégories de patients. L’âge moyen des patients atteints de maladie bénigne ponctuelle est de 48,6 ans, et celui des patients souffrant d’ALD de 50,8 ans. Ce faible écart ( 2 ans et 2 mois) contredit la théorie répandue selon laquelle les ALD touchent majoritairement une population âgée.
Un second point interpelle. La confiance en Internet est encore très relative. Malgré son essor, les patients accordent toujours, à une très forte majorité, leur confiance à un professionnel de santé. Les médecins spécialistes arrivent en tête avec 82% de taux de confiance, suivis par les généralistes avec 77%, et les pharmaciens avec 63%. Les livres et les articles recueillent 33% de taux de confiance, et les échanges avec les autres patients 27%. Les informations délivrées par les forums et les réseaux sociaux arrivent donc à la dernière place avec 13%.
Par conséquent le médecin reste la première source d’information du patient avec 71%. Et les 52% des personnes qui consultent Internet sont des femmes, ou appartiennent à la tranche d’âge 18-34 ans. Lorsque les patients sont interrogés sur leur recherche d’information, leurs réponses témoignent d’une volonté quasi égale de comprendre leur maladie ( 51% en ALD contre 48% pour les maladies bénignes). Mais c’est dans la projection de la maladie que les ALD se démarquent par la priorité qu’ils accordent à la connaissance des conséquences de la maladie, avec un taux de 47 % contre 38% .
Il apparaît donc que, si les patients-sachant représentent 14% des patients, c’est parmi les jeunes de 18/34 ans que se trouvent 80% des patients connectés. Ce sont eux qui consultent internet, fréquentent les réseaux sociaux, et s’informent auprès des sites web des laboratoires. CSP+, souvent en couple avec enfants, ils sont connaisseurs dès le pré-diagnostique, notamment pour les maladies à fort impact sur le patient et son entourage, en neurologie ou allergologie. Leur forte « appétence digitale » en font aussi, post diagnostique, des utilisateurs à 32% des applications mobiles pour gérer leur maladie – contre un taux général de connexion de 12%.
Etre un patient connecté est donc aujourd’hui une affaire de génération. Même satisfait de la qualité du diagnostic à 7,6 sur un échelle de 10, celui-là ne s’interdit pas de solliciter un second avis. Il choisit une gestion de sa santé multi-canaux, en amont et aval du diagnostic. Toutefois, malgré son profil d’influenceur », en 10 ans, il reste largement minoritaire. En effet 88% des patients n’utilisent pas d’applis. Sur ces 88%, plus de la moitié serait intéressée, avec encore une fois 77% parmi les 18/34ans.
10 ans après « l’année des patients et de leurs droits », le patient « connecté » reste l’exception.
Marie Combes