Devançant en quelque sorte les Européennes, Manuel Valls s’attaque à Barcelone. Anticipation de calendrier ou perte de repères ? Après avoir perdu ceux de son parti d’origine, le PS, il semble aussi perdre ceux du LREM, puisqu’il le quitte pour briguer Barcelone.Notre ancien Premier Ministre n’en finit plus d’afficher sa singularité.
Après avoir tenté d’atteindre la plus haute fonction de l’Etat, après avoir remporté, il y a un an, aux dernières législatives, la circonscription de l’Essonne d’une courte majorité de 139 voix, pour laquelle il avait « une infinie affection », Manuel Valls s’envole donc pour Barcelone. L’occasion pour lui d’affirmer – ou d’avouer- par la même occasion: « Il y a quelque chose que je ne trahirai jamais, c’est l’Europe, la France et Barcelone ». Pour les autres, Evry en tête, il trahirait donc, serait-on tenté de déduire.
En effet depuis sa démission du poste de Premier Ministre annoncée justement à la Mairie d’Evry dans un cadre épique, et après son échec à la primaire, il refuse de s’engager dans la campagne présidentielle de son concurrent Benoît Hamon. Suivant ensuite l’exemple de François de Rugy, Manuel Valls appelle à voter pour Emmanuel Macron juste avant le premier tour de la présidentielle. Mais, dès l’annonce de Manuel Valls, Emmanuel Macron fit un point presse pour stopper les ambition de l’impétrant, en vain d’ailleurs.
De fait on peut reconnaître une qualité à Manuel Valls, c’est sa constance dans l’inconstance. Lors des Primaires de la gauche, il n’avait pas hésité à déclarer dans une tribune du Journal du Dimanche, qu’il considérait, et ce depuis le second tour, qu’il avait » scrupuleusement respecté la règle qu’il s’était fixée: prendre le recul nécessaire, ne s’exprimer qu’avec un seul souci, l’intérêt du pays, et une seule ligne de conduite –la seule qui vaille- la cohérence ».
Dans le même temps, face à une position particulièrement surprenante de la part de l’ancien Premier Ministre de François Hollande, la Haute Autorité des Primaires Citoyennes déclara dans un communiqué: » Il contrevient gravement au principe de loyauté et à l’esprit même des primaires « , en ne respectant pas » l’engagement principal du scrutin « , qu’il a » signé de sa main » et » qui consiste à soutenir sans réserve le candidat sorti vainqueur » de celles-ci.
D’une certaine manière il est certain que Manuel Valls est cohérent avec lui-même. Ce n’est peut-être pas le sentiment que peut avoir une grande majorité des Français de l’idée de la cohérence d’un homme politique. L’analyse politique de Manuel Valls a peut-être été que son avenir politique, compte-tenu des nombreux rebondissements de la campagne présidentielle, était fortement dépendant de la mémoire et de l’appréciation future des Français sur sa « cohérence ».
Vraisemblablement cette analyse l’a conduit à réorienter son ambition vers d’autres cieux. Barcelone est donc pour Manuel Valls cette nouvelle terre. Le tout est qu’il puisse y gagner son pari en quittant Paris. Il semble toutefois que cela n’est pas acquis.
Jean Cousin