Une mention spéciale à Manuel Valls, pour ses propos et sa position déclarées dans une tribune du Journal du Dimanche. La Haute Autorité des Primaires Citoyennes, dans un communiqué publié mercredi 22 mars, constate une position particulièrement surprenante de la part de l’ancien Premier Ministre de François Hollande. L’instance confirme que l’ancien premier ministre, « contrevient gravement au principe de loyauté et à l’esprit même des primaires », en ne respectant pas « l’engagement principal du scrutin », qu’il a « signé de sa main » et « qui consiste à soutenir sans réserve le candidat sorti vainqueur » de celle-ci. Dans cette tribune, on peut y apprendre que Manuel Valls considère, et ce depuis le second tour, qu’il a » scrupuleusement respecté la règle qu’il s’était fixé: prendre le recul nécessaire, ne s’exprimer qu’avec un seul souci, l’intérêt du pays, et une seule ligne de conduite – la seule qui vaille- la cohérence ».
Au titre de la cohérence, Manuel Valls semble omettre dans son raisonnement que le Premier Ministre est de par la Constitution Française celui qui gouverne et mène la politique du pays. La question est alors de savoir si ce ne sont pas son soutien inconditionnel à la modification du Code du Travail, aux changements des programmes et actions au sein du ministère de l’Education Nationale, l’utilisation du 49.3, et les affirmations économiques qui furent les siennes sur la situation économique, assorties d’un programme suivant quasiment toutes les préconisations et particulièrement celle de l’OCDE qui ont précisément motivé son éviction du second tour de la primaire.
En effet, le rapport intitulé « Etudes Economiques de l’Ocde » de mars 2015 préconisait une série de mesures dans le domaine de la santé, par rapport au marché du travail. Ce rapport fut remis officiellement lors d’une conférence de presse par Angel Gurria Président de l’Ocde à Michel Sapin Ministre des Finances et des comptes publics d’alors, qui sembla considérer que l’application des préconisations de l’Ode serait de nature à inverser la courbe du chômage et à procurer de substantielles résultats économiques. La difficulté résidait dans le fait que ces préconisations s’appuyaient en grande partie sur la réduction des dépenses publiques, qui peuvent être raisonnablement considérées à l’origine de la perception négative du bilan du quinquennat de François Hollande.
Ce souci de cohérence aurait peut-être pu permettre à Manuel Valls de considérer, dans la droite ligne de la Constitution, que si une grande partie du corps électoral n’envisageait pas d’accorder ses suffrages à François Hollande, il était de son « devoir » constitutionnel d’être ‘le fusible » comme le furent beaucoup de premiers ministres sous la V ème République, et de porter les conséquences de sa gouvernance, afin de permettre à François Hollande de se présenter. En outre sa campagne lors des primaires sembla dès le premier jour une initiative extrêmement hasardeuse, que ses plus proches ne pensaient pas être opportune. Manuel Valls pouvait raisonnablement finir confortablement le quinquenat, profiter à ce titre d’une vision d’homme d’Etat, et préparer 2022.
Et cette même cohérence qu’il revendique aujourd’hui semble cruellement laisser à penser qu’il a signé un engagement à soutenir le vainqueur des primaires de la gauche qu’à la seule condition qu’il en soit la vainqueur. D’une certaine manière il est certain que Manuel Valls est cohérent face à lui-même, mais peut-être pas pour une grande majorité des Français. Son avenir politique, outre les nombreux rebondissements de cette campagne présidentielle, est fortement dépendante de la mémoire et de l’appréciation future des Français sur sa « cohérence ».
Marie Combes, Pierre Cusson