Najat Vallaud-Belkacem a sobrement et discrètement fait connaître sa décision d’abandonner la politique. Elle qui fut l’icône du PS depuis plus de dix ans, entre les mains de qui l’on remit un ministère capital au plan électoral, a annoncé en substance, non sans emphase, que la politique n’était pas une fin en soi: « Je n’ai d’ailleurs jamais voulu d’une vie réduite à la politique. Je sais qu’il y a d’autres façons de se rendre utile ».
Enfant prodige ou enfant gâtée de la politique, Najat Vallaud-Belkacem peut réellement susciter des interrogations. Dès son entrée au Ps les alliances lui permirent de progresser rapidement. De young leader à porte-parole de Ségolène Royal, puis de François Hollande pour les élections présidentielles de 2007 et 2012, par la suite ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement, et enfin ministre de l’Education Nationale. Un beau parcours emblématique de la volonté du PS d’alors de mettre en avant sa volonté d’ouverture.
Mais en fin de compte, que reste-t-il de l’action politique de Najat Vallaud-Belkacem? Certains pourraient l’ analyser sous l’angle du pragmatisme, si ce n’est sous celui d’un sens de la réal-politique dépassant peut-être les valeurs humanistes du PS. Ou bien Najat Vallaud-Belkacem était-elle réduite à la fonction de symbole d’une « image communicante », perdant ses liens avec la base politique du PS et la réalité tout simplement.
De fait durant la campagne présidentielle pour le moins ébouriffante qu’a connue le PS, Solférino présentait notes et arguments de campagne faisant état de ce qui apparaissait, tout porte en tout cas à le croire, comme la réussite éblouissante de l’action de Najat Vallaud-Belkacem à l’Education Nationale.
Mais dans le même temps les Français étaient soumis à toute autre réalité, car que cela soit la mise en oeuvre au pas de charge d’une énième réforme des programmes, coûteuses en énergie politique et en moyens financiers ou une gestion sans moyens financiers des personnels de l’Education National pourtant historiquement fer-de-lance de son électorat. Tout ceci pourrait on le conclure au vu des résultats électoraux, n’a abouti qu’a éloigné les Français du PS.
Solférino aurait pu pourtant constater que nul autre ministre n’a pourtant subi autant de grèves, de protestations, d’amertume que Najat Vallaud-Belkacem durant son passage à l’Education Nationale. Les syndicats des enseignants, les parents d’élèves et même les syndicats des proviseurs, d’habitude si discrets, manifestèrent.
Car l’Education Nationale concentre aujourd’hui toutes les critiques: des résultats calamiteux au PISA à l’incapacité structurelle du ministère à se réformer, en passant par le ressenti négatif créé par le déni des conséquences de la mise en oeuvre de l’APB.
Est-ce à dire que l’action de Najat Vallaud-Belkacem n’aurait pas été assez ferme au sein des caciques de son ministère pour voir les espoirs de Solférino se concrétiser?
Aujourd’hui celle qui, au soir du second tour des élections législatives en constatant sa défaite dans l’un des bastions du PS, déclarait « Je veux néanmoins remercier tous celles et ceux qui m’ont fait confiance,(…) je leur serai fidèle » et « je ne fais pas partie des intermittents de la politique qui ont besoin d’un mandat pour s’engager », celle-là même a choisi les Editions Fayard chez qui elle avait publié en 2012 son livre « Raison de plus! ». Et ses premiers mots y furent « Faire de la politique n’a rien d’une évidence, aujourd’hui moins qu’hier, et pour certains, encore moins que pour d’autres… ». Pour y diriger une collection d’essais elle a désormais le recul nécessaire pour regarder ses anciens camarades se battre pour le futur d’un parti dont elle se désengage.
Pierre Cusson, Marie Combes