Soleils noirs et forts contrastes: Le Renouveau

by Rédaction

Une nouvelle vague se profile avec un retour de la photographie argentique en noir et blanc. L’ exposition CONTRASTED PLACES consacrée à Takehiko Nakafuji et Gilles Roudière à la galerie in)(between en est un exemple. L’accrochage joue de la mise en miroir des ces deux approches. Celle de Nakafuji s’inscrit davantage dans une veine documentaire,  celle de Gilles intimise les paysages. L’exposition en dyptique renforce et dynamise le propos de chacun.

Le photographe Gilles Roudière utilise en effet l’éblouissement d’une nuit américaine pour découper le paysage urbain en aplats visuels . Au gré de ses errances, se laissant séduire par l’émotion de l’instant, l’intuition, la pertinence du hasard, il travaille la lumière au noir dans l’esprit des photographes japonais d’après-guerre comme Daido Moriyama. Les images de Gilles Roudière font irrésistiblement penser au cinéma expressionniste européen, de Murnau à Bella Tarr, tant par leur structuration  que par un sentiment de temps suspendu. La notion de territoire et de frontière, traitée de manière sensible, et non documentaire, apparaît comme une constante dans ses travaux sur l’Albanie et dans le travail récent sur la Palestine, Israël et Istanbul. Il analyse ainsi son travail: « Les images prises isolément doivent dégager une émotion immédiate. Elles ne sont pas narratives mais émotionnelles et contemplatives. C’est la scénographie de la juxtaposition,  la présentation en triptyque des clichés qui génèrent la cohérence et le fil du récit ». Ce travail n’exclut pas l’utilisation malicieuse des notions d’accident, des flou, rayure ou double exposition, apanages du procédé argentique, sans que ces recours ne deviennent pour autant systématiques.

C’est plus un jeu distancié sur la vérité de la chose photographique.
Takehiko Nakafuji, lui, travaille les réalités sociales. Il structure en effet son travail par rapport aux métropoles, une source d’inspiration infinie. Parcourant les villes d’Europe de l’Est, de Russie, du Japon ou des États-Unis, il photographie les paysages urbains en noir et blanc. Dans ses parcours photographiques il s’est attaché à photographier Berlin après la chute du mur, les anciennes capitales du socialisme soviétique. Takehiko Nakafuji capture les multiples signes des changements politiques, économiques et sociaux.

 

Ses photographies de Berlin, Varsovie, Prague et Budapest donnent lieu à la série Winterlicht. A Bucarest au contraire Takehiko Nakafuji  consacre une série indépendante car il la qualifie de « diabolique ». La capitale de la Roumanie est en effet, à la fin des années 90, en ruines, plongée dans le chaos, au sortir de la révolution sanglante qui l’a libérée du régime totalitaire de Ceausescu. Takehiko Nakafuji parvient à exprimer cette atmosphère si particulière, entre souvenir d’un passé austère et espoir de renouveau, dans des images intenses, dynamiques, aux contrastes rehaussés par l’utilisation du papier forte, qui poursuivent sa passionnante exploration formelle grâce à une navigation  entre pur documentaire et touches surréalistes. Copyright Forks 2014
in between gallery 3 rue st Anastase 75003 Parisjusqu’au 21 juin 2014
www.inbetweengallery.com

Jean Cousin

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